1568-1 : l'apposition de la formule exécutoire par le greffe sur les actes d'avocat constatant des accords parentaux est officiellement possible !
La loi du 25 février 2022 (dite « confiance ») a créé un nouveau titre exécutoire pour les accords issus d’une transaction, d’une conciliation ou d’une procédure participative contresignés par avocat (article L 111-3, 7e[1] Code de l’exécution).
Le décret 2022-245 du 25 févr. 2022[2] pris en application de la loi a organisé la procédure à suivre pour obtenir l’apposition de la formule exécutoire sur ces actes aux art 1568, 1569, 1570, 1571 CPC[3], tandis que la circulaire prise en application du texte y a encore apporté des précisions (notamment sur l’étendue du pouvoir de contrôle du greffier ou sa compétence territoriale).
Il résulte de la lecture combinée des articles L111-3,7e et 1568 et 1571 que les actes, pour être revêtus de la formule exécutoire par le greffe, doivent prendre la forme d’un acte d’avocat.
Selon l’article 1568, la demande est formée par écrit, en double exemplaire, au greffe de la juridiction du domicile du demandeur matériellement compétente pour connaître du contentieux de la matière dont relève l’accord. Cette demande d’apposition de la formule exécutoire peut être formulée par une seule des parties à l’acte.
Le greffier n’appose, selon l’article 1568, la formule exécutoire qu’après avoir vérifié sa compétence et la nature de l’acte. C’est donc un contrôle très étroit, le greffier ne pouvant que vérifier sa compétence territoriale et la nature de l’acte, c’est-à-dire qu’il est bien issu d’une conciliation, d’une médiation, ou d’une procédure participative, ou qu’il répond à la condition de la transaction posée par l’article 2044 du Code civil. Pas de contrôle de la conformité, même seulement apparente, à l’ordre public.
La circulaire du 7 avril 2022 précise encore, s’agissant de la nature de l’acte, que la vérification par le greffier se limite aux seules mentions de l’acte présenté, qui doivent suffire à le qualifier. Il ne procède à aucune autre vérification portant sur le contenu ou les mentions de l’acte. Il ne s’agit donc pas d’un contrôle de la qualification de l’acte, mais de leur seule dénomination car le greffier n’a pas le pouvoir d’interprétation. S’agissant de la compétence, il est ajouté que le greffe vérifie que la résidence du demandeur est bien située dans le ressort du TJ, mais cette vérification est encore purement formelle, car toutes difficultés sur les informations contenues dans cet acte est de la responsabilité des avocats signataires. Si le demandeur fait état d’une adresse différente de celle produite dans l’acte, il doit produire une pièce justificative. En ce qui concerne la compétence matérielle, la circulaire est silencieuse sur la nature du contrôle, « qui n’a en vérité aucun intérêt s’il ne porte pas au fond »[4].
Si le greffier refuse d’apposer la formule exécutoire, soit il l’accepte, mais dans les deux cas la décision est transmise au demandeur par lettre simple (1569 al 1) tandis que le double de la demande, la copie de l’acte ou la décision de refus sont conservées au greffe (1569 al 2).
L’article 1570 prévoit les modalités de contestation de l’acte : « toute personne peut former une demande aux fins de suppression de la formule exécutoire ». En ce cas, la demande est formée, instruite et jugée selon les règles de la procédure accélérée au fond. Si le greffier a refusé d’apposer la formule exécutoire, il n’y a aucune voie de contestation (alors qu’en cas de refus d’homologation, l’appel est possible, 1566 CPC)[5].
Le dispositif antérieur, concernant l'homologation judiciaire d'un accord ne rentrant pas dans le cadre d'un acte contresigné par les avocats, est maintenu aux articles 1565 à 1567 du code de procédure civile qui figurent sous une section 1 intitulée « De l'homologation judiciaire » (Décr. n° 2022-245, art. 1er, 21°, a).
L’option existe donc entre les deux voies, apposition de la formule exécutoire par le greffe ou homologation par le juge (1565 et 1567). Dans ce cas, toutefois, le contrôle du juge sera plus important, car il semble résulter de la jurisprudence que le juge doit néanmoins vérifier que l’accord n’est pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. Le greffier, en revanche, n’est pas tenu de ces contrôles. En contrepartie, l’efficacité de l’acte homologué serait sans doute supérieure (conf. position de Natalie Fricero), l'acte n'est "qu'un acte sous seing privé, revêtu d'une formule exécutoire, qui pourra être remise en cause devant un juge dans le cadre des règles de droit commun" (Stéphane Mazars).
Sources : S. AMRANI-MEKKI, Dépêche du 7 avril 2022 : mode d’emploi de l’apposition de la formule exécutoire, GP 26/04/22, n°14, p. 34 te L. Mayer, Les aspects du décret n°2022-245 du 25 février 2022 relatifs aux modes amiables de résolution des différends, GP 26/04/22, n°14, p. 60.
La formule exécutoire peut donc être apposée sur les actes d'avocat faisant suite à une transaction, une procédure participative, une conciliation ou une médiation, lorsqu'ils portent sur la fixation ou la modification d'une pension alimentaire :
- L’article 373-2-2 prévoit expressément la possibilité de la voir fixée par « 6° Une transaction ou un acte constatant un accord issu d'une médiation, d'une conciliation ou d'une procédure participative, lorsqu'ils sont contresignés par les avocats de chacune des parties et revêtus de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction compétente en application du 7° de l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution[1] ».
- L’article 373-2-3 permet également que l’aménagement des formes du versement de la pension puisse résulte d’un même acte[2].
- En revanche, l’article 373-2-6 limite pour le juge la possibilité d’assortir d’astreinte « l’accord parental » au fait qu’il ait été constaté dans l’un des titres mentionnés et 1e et 2e de l’article 373-2-2 du Code civil (une décision judiciaire ou une convention homologuée par le juge) : « Il peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision. Si les circonstances en font apparaître la nécessité, il peut assortir d'une astreinte la décision rendue par un autre juge ainsi que l'accord parental constaté dans l'un des titres mentionnés aux 1° et 2° du I de l'article 373-2-2. Les dispositions des articles L. 131-2 à L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution sont applicables ». L’intermédiation est également possible.
L’acte d’avocats sur lequel le greffier appose la formule exécutoire est donc tout à fait possible en matière purement alimentaire, mais il ne sera pas possible de l’assortir d’une astreinte (373-2-6), tandis que la prescription de l’exécution d’un titre, qui est de 10 ans pour les décisions de justice et les accords homologués par le juge, n'est que de 5 ans pour les actes d’avocats art. L . 111-4 CPCE). Donc attention aux conséquences juridiques de cette formule exécutoire du greffier.
En revanche, quid de la convention qui porterait sur l’autorité parentale ?
Aucun texte ne le prévoyait, de telle sorte que la volonté du législateur semblait avoir été de l’exclure (ce qui n’est pas très logique au regard du fait que l’accord de volonté est en revanche valable et constitue un titre exécutoire dans le DCM).
Par ailleurs, la lettre de l'article 373-2-7 semblait les soumettre au juge et par dérogation, à l'accord parental, homologué par le juge.
Cependant le Décret n° 2023-25 du 23 janvier 2023 vient de créer un article 1568-1, rédigé comme suit : « Art. 1568-1. - Lorsque l'accord porte sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, il est fait mention dans l'acte de ce que le mineur capable de discernement a été avisé de son droit à être entendu et, le cas échéant, qu'il n'a pas souhaité faire usage de cette faculté. A défaut, le greffier rejette la demande. » ;
L'accord peut donc porter sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, sans passer par l'homologation du juge !
Le lien vers le décret est ici : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000047047071
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