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Droit de visite du parent social : article 371-4 du Code Civil

Le 16 mars 2022
Droit de visite du parent social : article 371-4 du Code Civil
Couple de même sexe/parent social : obtenir un droit de visite en application de l'article 371-4 du code civil avec le cabinet LEBEL AVOCAT, cabinet spécialisé en droit de la famille, des personnes et

Lorsqu'aucun lien de filiation n'a été établi entre l'enfant et son parent social, il ne dispose d'aucun lien juridique avec l'enfant et ne pourra conserver de relations avec lui qu'en saisissant la justice en application des dispositons de l'article 371-4 du Code civil.

La loi du 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, a en effet prévu une hypothèse particulière de maintien des liens de l'enfant avec un tiers, lorsque celui-ci a vécu avec lui et l'un de ses parents de manière stable, qu'il a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et qu'il a noué avec lui des liens affectifs et stables. Cette incitation, tendant à accorder une importance particulière à la personne qui a vécu avec l'enfant et son autre parent, est indiscutablement destinée à favoriser le maintien des relations de l'enfant avec son ex-beau-parent.

Seul l’intérêt de l’enfant doit ici être pris en considération et c’est le juge qui apprécie souverainement l’intérêt de l’enfant, en fonction des critères posés par le Code Civil, étant précisé que le texte, même dans sa rédaction antérieure à 2013, a toujours eu vocation à permettre le maintien du lien entre l’enfant et un tiers, non en raison de liens de parenté mais de liens affectifs (Civ., 1e, 4 nov. 1987, pour une tante maternelle, Civ. 1e, 1e déc. 1982 pour des parrains et marraine, Civ. 1e, 17 mai 1972, Grenoble, 15 dec 1997, pour les beaux-parents en famille recomposée, TGI Briey, 21 oct. 2010, RG no 09/00482 pour l’ex-compagne dans le couple de même sexe).

L'ex-beau parent qui a vécu avec l'enfant ne dispose cependant pas d'un droit absolu à se voir reconnaître un droit de visite. Encore faut-il en effet que celui-ci soit conforme à l'intérêt de l'enfant.

Dans l'arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 23 octobre 2013 (Civ. 1re, 23 oct. 2013, no 12-20.560) l'ancienne concubine de la mère s'est ainsi vu refuser un droit de visite sur l'enfant qui avait pourtant fait l'objet d'un projet commun et qui avait été élevé par les deux femmes pendant trois ans, à raison de la rupture des relations de l'enfant avec l'ancienne compagne de sa mère depuis trois ans.

La Cour de cassation dans un arrêt du 13 juillet 2017 (Civ. 1re, 13 juill. 2017, no 16-24.084) a semblé sous-entendre que la rupture des relations, à l'initiative de la mère de l'enfant, ne constitue plus une raison suffisante pour refuser un droit de visite à la personne qui a participé à son éducation durant les premières années de sa vie.

Deux arrêts rendus le 6 novembre 2019 et 24 juin 2020 ont cependant refusé d’accorder un droit de visite à des femmes qui, après avoir mené à bien des projets parentaux avec leur compagne, se trouvaient « chassées » de la vie de l'enfant qu'elles avaient souhaité et élevé, notamment en raison du « conflit de loyauté » dans lequel se trouvait impliqué l’enfant ou l’état psychologique de l’enfant

La CEDH a par ailleurs rappelé que l’intérêt de l’enfant doit primer sur le droit au respect de la vie familiale du tiers (CEDH, 12 nov. 2020, req. 19511/16).

Enfin, la Cour de cassation a rappelé que le droit de visite du parent social pouvait être organisé en point rencontre (Cass., 1e civ., 8 juillet 2021, 21-14.055).

Au regard de ce qui précède, il est donc possible de s’opposer à l’octroi d’un droit de visite au profit du parent social en démontrant que celui qui le sollicite ne constituait pas le parent social de l’enfant, par référence aux critères posés par le texte, mais aussi la rupture du lien et l’absence d’intérêt de l’enfant à la poursuite des relations.

A l’inverse et en demande, il faut démontrer que le demandeur présente bien les critères du parent social et veiller à la poursuite du lien, notamment par une procédure à jour fixe et l’organisation d’un incident dès la saisine de la juridiction.

Pour le surplus,  la procédure fondée sur les dispositions de l’article 371-4 suppose un avis du ministère public, en application des dispositions de l’article 1180 du Code de procédure civile et relève de la procédure écrite ordinaire devant le Juge aux Affaires familiales du lieu de résidence de l’enfant, avec constitution d’avocat obligatoire.

Certains demandeurs tentent d’instrumentaliser l’article 973-2-8 du Code civil, qui prévoit que « Le juge peut également être saisi par l'un des parents ou le ministère public, qui peut lui-même être saisi par un tiers, parent ou non, à l'effet de statuer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale et sur la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant ».

Si cet article permet aux tiers à qui l’enfant est confié d’obtenir, alors qu’ils ne sont pas titulaires de l’autorité parentale, une décision encadrant le droit de visite et d’hébergement des parents et leur contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant.

Cet article en revanche, ne permet pas au tiers de solliciter sa propre condamnation à verser une pension alimentaire aux parents de l’enfant.

Il n’existe aucune disposition qui permette au JAF de statuer sur une pension alimentaire à la charge d’un tiers qui peut toutefois et s’il le souhaite, contribuer spontanément à l’entretien et l’éducation de l’enfant, sans qu’il ne lui soit possible de solliciter sa condamnation par le juge aux affaires familiales.

Aurélie LEBEL, avocat, Lille, spécialiste de droit de la famille, des personnes et du patrimoine, cabinet spécialisé dans les questions d'homoparentalité et de droit de visite