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Réviser ou supprimer la prestation compensatoire sous forme de rente : possible ?

Le 13 février 2024
Réviser ou supprimer la prestation compensatoire sous forme de rente : possible ?
L'avantage manifestement excessif et les prestations compensatoires fixées sous forme de rente après le 30 juin 2000

La prestation compensatoire a été introduite dans le droit français en 1975, en même temps que le recours au divorce se trouvait facilité (article 270 CC) : 

"Sauf lorsqu'il est prononcé en raison de la rupture de la vie commune, le divorce met fin au devoir de secours prévu par l'article 212 du code civil ; mais l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives."

L'article 276-1 permettait cependant au juge, "à défaut de capital", de prévoir le paiement sous forme de rente, plus facile à financer immédiatement, mais qui finit par peser lourd sur le débiteur et sa succession, à qui elle se trouve transmise (article 276-2). Elle se rapprochait en réalité de la poursuite du devoir de secours prévue par l'article 281 lorsque le divorce était prononcé pour rupture de la vie commune. 

La prestation compensatoire n'était par ailleurs modifiable, selon les dispositions de l'article 273 du Code civil, qu'à condition de justifier de "conséquences d'une exceptionnelle gravité", même en cas de changement imprévu dans les ressources ou les besoins des parties, et avait un caractère "forfaitaire". 

En cas de divorce par consentement mutuel, les époux fixaient eux-mêmes le montant et la forme de la prestation, le juge pouvant refuser de l'homologuer si les droits des parties n'étaient pas équitablement fixés (278). La convention pouvait contenir une clause prévoyant la faculté de demander au juge de réviser la prestation compensatoire "en cas de changement imprévu dans ses ressources et ses besoins" (279). 

Un mouvement visant à alléger la charge pesant sur le débiteur a conduit à la loi du 30 juin 2000, qui a posé le principe d'un paiement en capital de la prestation compensatoire (article 274) et précisé le caractère exceptionnel de la rente (article 276), "par décision spécialement motivée en raison de l'âge ou de l'état de santé du créancier ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins". Elle a introduit l'article 267-3, autorisant la révision de la prestation compensatoire fixée sous forme de rente viagère "en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties". 

Ce faisant, elle a facilité la révision des prestations versées sous forme de rente, qui a cessé d'être subordonnée à la démonstration de circonstances d'une exceptionnelle gravité. En cas de divorce par consentement mutuel, les époux fixent toujours eux-mêmes le montant et les modalités de la prestation compensatoire, qui ne peut être modifiée que par une nouvelle convention entre les époux, également soumise à l'homologation, les époux conservant la possibilité de prévoir dans leur convention que chacun pourra demander au juge de la réviser en cas de "changement dans les ressources et besoins des parties". 

En 2004, la loi a précisé que les dispositions de l'article 267-3 était applicable aux rentes fixées avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 30 juillet 2000 et a ajouté, les concernant, une disposition spéciale (article 33, VI, al 1 de la loi 2004-439 du 26 mai 2004) prévoyant la possibilité pour le débiteur ou ses héritiers d'en demander la révision, la suppression ou la suspension "lorsque le maintien en l'état de la rente serait de nature à procurer au créancier un avantage manifestement excessif. A ce titre, il est tenu compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé".

Cette disposition transitoire n'est cependant applicable qu'aux rentes fixées avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, le législateur partant du principe que le capital se substituerait à la rente dans tous les divorces prononcés après le 30 juin 2000.

Sauf que tel n'a pas été le cas, la pratique ayant mis un temps certain avant d'intégrer le nouveau principe, les rentes touchant par ailleurs généralement les débiteurs les moins fortunés (artisans, employés...), incapables de verser immédiatement un capital important. Or ces nouvelles rentes ne peuvent être révisées même lorsqu'elles ont procuré au créancier un avantage manifestement excessif.

Reste donc, les concernant, la seule option de la démonstration d'un changement "important" dans la situation des parties. 

Prestation compensatoire, rente et révision, Cabinet LEBEL AVOCATS, secretariat@lebelavocats.fr